Où on va papa, de Jean-Louis Fournier

Voilà plusieurs mois qu’il avait gonflé les rayons de ma bibliothèque sans que je trouve le courage de l’ouvrir.

En le refermant quelques heures à peine après l’avoir commencé, je me suis dit que oui, c’est bien ça qui me faisait défaut jusqu’alors : le courage.

Ce livre n’est pas triste. Ou pas seulement. Mais autant vous le dire tout de suite : il faut avoir le cœur bien accroché pour rire à son tour et rejoindre cette ronde burlesque et au cynisme malgré tout empreint d’un amour immodéré dans laquelle l’auteur cherche à nous entraîner.

« Où on va, papa ?« , c’est l’histoire d’un papa qui raconte son quotidien auprès de ses deux enfants. L’ainé, Mathieu, est handicapé. Lorsque son frère Thomas nait, c’est un soulagement : « la foudre ne frappe jamais deux fois au même endroit ». Perdu. Quelques semaines après sa naissance, Thomas est lui aussi diagnostiqué comme étant un enfant lourdement handicapé.

Alors, le papa se livre. Il rit, il se moque, il taquine, il sanglote presque, aussi, parfois. Avec « Où on va, papa ?« , c’est le grand huit des émotions assuré. On réprime souvent un sourire, un peu honteusement, à base de « oh la la mais il a osé dire ça, quand même ! », presque mal à l’aise d’avoir été pris les doigts dans le pot de confiture.

Mais au fond, n’est-ce pas là ce que veut l’auteur, justement ? Nous faire sourire. Nous faire rire. Et peut être nous prouver que « les enfants handicapés sont des enfants presque comme les autres ». Ou pas. L’auteur nous laisse seul juge.

Reste que le livre est merveilleusement servi par une plume magnifique. Les chapitres sont courts, parfois décousus, parfois durs ou au contraire emprunts d’un humour à fleur de peau. Dans tous les cas, ce livre est assurément émouvant…

Ce que dit la 4ème de couv’ : Jusqu’à ce jour, je n’ai jamais parlé de mes deux garçons. Pourquoi ? J’avais honte ? Peur qu’on me plaigne ? Tout cela un peu mélangé. Je crois, surtout, que c’était pour échapper à la question terrible : « Qu’est-ce qu’ils font ? » Aujourd’hui que le temps presse, que la fin du monde est proche et que je suis de plus en plus biodégradable, j’ai décidé de leur écrire un livre. Pour qu’on ne les oublie pas, qu’il ne reste pas d’eux seulement une photo sur une carte d’invalidité. Peut-être pour dire mes remords. Je n’ai pas été un très bon père. Souvent, je ne les supportais pas. Avec eux, il fallait une patience d’ange, et je ne suis pas un ange. Quand on parle des enfants handicapés, on prend un air de circonstance, comme quand on parle d’une catastrophe. Pour une fois, je voudrais essayer de parler d’eux avec le sourire. Ils m’ont fait rire avec leurs bêtises, et pas toujours involontairement. Grâce à eux, j’ai eu des avantages sur les parents d’enfants normaux. Je n’ai pas eu de soucis avec leurs études ni leur orientation professionnelle. Nous n’avons pas eu à hésiter entre filière scientifique et filière littéraire. Pas eu à nous inquiéter de savoir ce qu’ils feraient plus tard, on a su rapidement que ce serait : rien. Et surtout, pendant de nombreuses années, j’ai bénéficié d’une vignette automobile gratuite. Grâce à eux, j’ai pu rouler dans des grosses voitures américaines.

Commentaires

J’ai beaucoup aimé ce livre moi aussi….J’ai pleuré, j’ai ri, et parfois les 2 en même temps!
Un livre trés émouvant…

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C’est le genre de livre autour duquel je tourne longtemps avant d’oser le lire. Je crains toujours les très grosses émotions. Tiens là rien qu’en lisant ce que tu en écris et la 4° de couv’, je sens les larmes.

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Merci pour ton billet car c’est un livre qui m’intriguait. Je pense qu’il pourrait me plaire, mais comme tu dis il faut bien choisir le moment où on l’ouvre…

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Ce livre est très bon, comme ses autres ouvrages d’ailleurs mais plus dans la catégorie rigolade. Celui – ci est excellent et correspond parfaitement (enfin du moins de ceux que je connais) à ce que peuvent ressentir les parents d’enfants handicapés.. cyniques, mais remplis d’amour et de courage! Ce livre n’a pas fait spécialement de remous, c’est bien d’en parler, merci!!

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J’en avais entendu parler, mais un peu effrayée à l’idée de le lire par le sujet un peu difficile. Dans un sens, ce que tu dis m’a rassurée. Je fonce à la bibliothèque à la fin de la journée.
Bises

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J’aime bien le coup de la vignette automobile sur la 4ème de couv 😉 Ça correspond bien à la description que tu fais du livre !

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Moi aussi, j’ai mis du temps à oser le lire, puis je ne l’ai plus lâché une fois ouvert… On le lit d’une traite, c’est bien écrit, avec humour, finesse et sans pathos, tout en comprenant la douleur, l’amour et l’impuissance de ce père face au handicap de ses enfants.

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c’est un livre que j’ai lu dés sa sortie ( moi-même maman d’un petit garçon handicapé)…et j’ai ri!! Pour une fois qu’un livre sur le handicap me fait rire…en plus il se lit très vite vu la longueur des chapitres.

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je l’ai bien aimé moi aussi, et j’ai trouvé qu’il remettait pas mal nos certitudes en cause. Autant pour les gens qui ne conçoivent pas d’avoir un enfant handicapé qui découvrent toutes les joies que ces enfants peuvent apporter, que pour ceux qui ne conçoivent pas de ne pas garder ces enfants, et qui se rendent compte que non ce n’est pas une bénédiction, mais au contraire une succession d’épreuves.

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J’ai été bouleversée par ce livre à la fois tendre et corrosif. Fournier était le compère de Desproges, ils ont co-écrit ensemble quelques sketches à l’humour noir, en lisant ce livre on sent la filiation…

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ouh la la, je vais m’abstenir de lire ce livre pendant que je suis enceinte, ça risquerait de me faire faire des cauchemars…

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Ben pareil que Shupi en Suisse, pour l’instant je vais m’abstenir… et j’attendrais d’avoir le courage (je viens bien d’acheter « D’autres vies que la miennes », tout vient a point…)

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J’avais beaucoup aimé ce livre, qui témoigne de l’injustice et de la cruauté de la vie, mais aussi de sa beauté. Bouleversant…

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a sa parution j’ai eu très envie de lire ce livre mais peut-être par peur d’une histoire trop prenante j’ai opté pour la ballade le lila K magnifique livre que je vous conseil au passage, le prochain seras surement celui la, l’article me l’a rappelé et m’a donnée envie de le lire!
des bises

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Rien qu’en lisant cette phrase « Nous n’avons pas eu à hésiter entre filière scientifique et filière littéraire. Pas eu à nous inquiéter de savoir ce qu’ils feraient plus tard, on a su rapidement que ce serait : rien.  » J’en ai les larmes aux yeux parce que ça me renvoie à mes propres préoccupations (mon fils à 2 ans, hum…)
Je l’ai récupéré à mon boulot, je vais essayer de le lire parce qu’après le livre d’Anne-Marie Revol « Nos étoiles ont filé », j’ai eu mon quota d’émotion…

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J’ai pris le parti de rire immédiatement mais c’est un de mes défauts : je me protège trop 🙂 au risque de passer parfois à côté d’autres émotions…
une lecture à recommander, sauf si on est au fond du trou !

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j’ai lu ce livre sur les conseils d’une amie et je l’ai trouvé excellent.
Il est surtout remarquablement bien écrit. Il est vrai que c’est un livre émouvant.
En général chez Stock les livres sont assez bons.

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Deedee, j’adore lire ton blog et ta prose. Il n’y a pas beaucoup de fautes, fait rare pour être souligné. Mais aujourd’hui, tu confonds le verbe emprunter et empreindre…

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La mega tehon… Corrigé, merci de me l’avoir signalé !

De rien! Ce n’est pas la honte, moi-même, j’en fais et j’aime bien qu’on m’explique mes erreurs pour éviter de les refaire !!!

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C’est l’enfer. Je me relis, pourtant, et je fais relire, dans la mesure du possible. Mais je crains que rédiger les billets entre 23h30 et 1h du matin n’aide pas 🙂 Dans tous les cas, merci encore !

Je l’ai lu aussi… Emouvant, écriture juste, on a presque honte de rire parfois quand l’auteur énonce certaines « sorties » de ses enfants, exactement comme quand tu dis « il a osé écrire ça »… Le style décousu m’a un peu déconcertée au début mais je n’ai pas pu le lâcher. J’ai bcp d’admiration pour ce père.

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Merci d’en parler. Un livre magnifique, qui se lit d’une traite, émeut aux larmes et fait aussi pleurer de rire! Vivement recommandé à tous

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Bonjour Deedee 🙂 J’ai lu « Où on va papa » il y a quelques mois maintenant (avant d’enchaîner avec tous les livres pour le bac de français, beaucoup moins plaisants.. ahem) et je me souviens avoir été très touchée à la fois par le style de l’auteur, mais aussi par cet humour qui est finalement triste. Le fait que tu en parles aujourd’hui me fait d’ailleurs penser à un film diffusé hier soir sur la 2, « Simple » qui raconte également l’histoire d’un jeune homme devant s’occuper de son frère handicapé. Ainsi, c’est avec humour que le regard de la société sur les handicapés est dénoncé, mais cette situation d’intolérance peut parfois nous horrifier…. En tous cas, très bon livre et très bon film aussi 🙂
Bonne fin de journée !

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Je ne connais pas ce livre mais le simple fait que tu en parles sur ton blog « de fille » me fait penser que l’auteur a finalement un peu reussi a casser les barrieres entre le monde des personnes handicapees et celui des personnes valides.

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Je ne connais pas ce livre, mais maintenant que tu en parles, je le lirais bien. J’ai un petit cousin gravement handicapé et je suis médusée par le courage de mon oncle et ma tante, par leur souffrance aussi. Et par les réactions des gens aussi. Un jour, une femme est venue leur dire à quel point elle les admirait. Ma tante a eu un petit sourire triste et elle a dit « vous savez madame, je n’ai pas le choix ». Le handicap est souvent mal compris et les structures manquent cruellement, donc tout livre qui brise le tabou qui entoure le handicap des enfants est bienvenu. Je vais allez voir si ils l’ont dans la librairie de ma froide contrée.

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je lis ton blog depuis pfiouuuu au moins tout ça, je n’ai pas grand chose à voir avec toi, je vis en province dans une petite ville et je trouve que paris est une très belle ville mais qu’il faut être fou pour y vivre 😉 , je suis fan des vêtements et de la mode mais sans doute d’une mode provinciale car j’aime rarement ce que tu portes … et là tu te dis non mais qu’est ce qu’elle veut elle pourquoi elle vient 😉 et bien je viens ici parce que j’aime la façon dont tu écris (le ton jovial, enjoué, frais et spontané), les récits de tes voyages, les photos avec ton mouton, tes découvertes et par dessus tout tes lectures où j’ai déjà pioché un grand nombre de livres sans êtres jamais déçue… et aujourd’hui je me décide à commenter car j’ai beaucoup aimé ce livre que j’ai trouvé bouleversant de tendresse et d’amour … pour moi par contre il serait dans la catégorie « à ne pas manquer » car enfin on nous dit que OUI on peut aimer un enfant handicapé car c’est avant tout notre enfant et que NON on a pas à s’excuser aux yeux de la société avec sa foutue norme mais que pourtant parfois c’est usant, fatiguant … d’avoir un enfant handicapé et que oui on a le droit de le dire. voilà bonne continuation à toi et longue à ce blog frais !

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Ma tante m’en a parlé plusieurs fois, il faut que je le lise.

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Bonjour,
Je tiens à indiquer ici le site de la maman des deux enfants, Thomas et Mathieu, dont il est question dans le livre :
http://mamanmathieuetthomas.monsite.orange.fr/
Chacun se fera son opinion.

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Merci pour ce lien Amarantha. Je crois que les lecteurs du livre ont perçu le côté roman. On se doute bien qu’il y a une narration, avec tout ce que le procédé implique. Cela étant, c’est vraiment, je ne sais pas, touchant/complémentaire de lire le témoignage de la maman de Matthieu et de Thomas.

Mais de rien Deedee, je t’en prie. Chacun des parents semble avoir vécu sa souffrance sans se rejoindre puisqu’ils sont séparés. La réalité est sans doute quelque part entre les deux témoignages…

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