Tous les hommes sont mortels, de Simone de Beauvoir

Il faut que je vous fasse une confidence : Tous les hommes sont mortels est mon premier Simone de Beauvoir. Je ne sais pas pourquoi, je me faisais tout un monde de cette auteure. Je la mettais, à tort, dans le même panier que Marguerite Duras (j’ai lu Les Petits Chevaux de Tarquinia et bon, mouaif) et autres auteurs dont le nom est si emblématique, si imposant qu’on ose à peine caresser leurs livres du regard.

Jusqu’au détour par une tête de gondole, celle de la petite librairie à côté du boulot que j’affectionne tout particulièrement. Je pioche ça et là des livres au hasard, lis quelques lignes de la 4ème de couv’, quelques lignes du début du livre et hop, je prends. Ou pas.

Bien m’en pris de prendre celui-ci : j’ai beaucoup, beaucoup aimé.

Tous les hommes sont mortels est à la limite du conte philosophique. En bien moins drôle que le Candide de Voltaire (mais vu qu’il fait partie de mes livres cultes, je suis sûrement à la limite de l’objectivité). Pas drôle du tout, même, la morale de ce livre étant violemment pessimiste.

C’est l’histoire d’un homme qui succombe à l’envie d’être immortel et qui malgré la mise en garde de son épouse, gobe cul sec une petite fiole magique. Et hop ! Immortel, il le devient. S’il tente pendant les premières -longues- années de résoudre les problèmes qui lui incombent, il s’aperçoit très vite que quelle que soit la solution apportée à ses problèmes, elle s’avère inutile.

Inutile, comme son existence, qu’il n’a de cesse de recommencer encore et encore. Inutile, comme ces relations qu’il noue et qui sont toutes vouées à l’échec car inexorablement rattrapées par la mort, puis grignotées par l’oubli. Inutile, comme l’acuité de son intelligence qui in fine, ne lui sert qu’à prendre conscience que d’une seule chose : jamais il ne pourra vivre puisque la mort ne lui est pas permise.

Quant au style, loin d’être pompeux, il sert magnifiquement le propos… Pour sûr, je lirai à nouveau du Simone de Beauvoir.

Ce que dit la 4ème de couv’ : Si l’on nous offrait l’immortalité sur la terre, qui est-ce qui accepterait ce triste présent ? Demande Jean-Jacques Rousseau dans l’Emile. Ce livre est l’histoire d’un homme qui a accepté.

Commentaires

Il ne trône pas dans ma bibliothèque d’ex-khâgneuse (Shame!). Ce sera chose faite au plus vite. Grâce à qui? Deedee…of course. Thanks

Répondre

Ca donne envie tout ça. C’est vrai que ça pourrait devenir vite pompeux avec un tel sujet mais si tu dis que non… A mettre dans la liste "livres à lire TOUT DE SUITE!" 🙂 Merchiiii

Répondre

Merci pour cette critique, elle donne envie! Je n’aurais pourtant pas été spontanément vers ce livre…

Répondre

Tiens, le résumé me fait penser à un autre livre que j’ai lu il y a quelques années maintenant, "L’homme de main" de Belletto. C’est l’histoire d’un homme qui se retrouve immortel du jour au lendemain et fait tout pour mettre à l’épreuve son immortalité… La fin est tout simplement géniale! Malheureusement, ce livre est introuvable (édition épuisée) et j’aimerai tellement le relire!

En plus je suis un peu comme toi, je flâne, je touche, je lis la quatrième de couverture, les premières lignes et je fais mon choix!

Je viens d’ajouter Simone de Beauvoir dans ma liste de livres à lire, qui est déjà longue!

Répondre

Je n’ai jamais de Beauvoir jusqu’à présent ce serait l’occasion 🙂
Quel sera le prochain livre qui nous donnera envie ?? (Merci ^^)

Répondre

Si je peux me permettre une petite suggestion, "La cérémonie des adieux" est aussi une merveille, quoi que d’un registre différent: il s’agit des dernières années de Sartre, années dont elle a largement partagé l’existence. A la fin de l’ouvrage, elle a retranscrit des entretiens audios qu’elle avait pris l’initiative d’enregistrer avec lui en se mettant dans la position de l’interviewer (ils y abordent beaucoup de choses, de la vie professionnelle à sa position sentimentale, et jusqu’à la place de Simone dans sa vie). C’est une vraie mine d’or… Certains passages, et particulièrement les entretiens, sont très touchants en ce sens: on les voit enfin comme deux personnes. Atypiques, certes, mais bien loin des poids respectifs de leurs noms.

Sinon, il y a aussi le très connu "deuxième sexe" qui est excellent. Il y a des cynismes hilarants sur quelques aspects trèèès féminins, sans tomber dans la caricature. Le style est impeccable, et j’aime beaucoup le fait qu’à la suite de cet ouvrage on puisse mesurer quel était réellement le féminisme de Beauvoir, bien au-delà de la définition étroite et cloisonnée (voire péjorative) qui s’est installée aujourd’hui.

Bref, ce sont des idées, je remets mon scotch sur la bouche maintenant :X

Répondre

Sur la même idée, mais traitée plutôt différemment : Pilgrim, de Timothy Findley.

Le résumé de la 4e : "Schizophrène ou immortel ? Pilgrim aurait traversé les millénaires sans prendre une ride. Un roman philosophique palpitant, qui raconte l’inconscient collectif occidental à travers celui d’un homme."

Très bon j’ai trouvé !

Répondre

Dans ce cas je te conseille "Journal d’une jeune fille rangée" 🙂
Tres agréable de voir parler de livres sur un blog féminin 🙂

Répondre

Marrant… cela fait des lustres que je n’ai rien lu d’elle, exaspéré par l’invitée, un de ses romans, que je trouverais peut-être émouvant aujourd’hui, et par un roman dont le titre m’échappe mais dont l’héroïne renie son fils parce qu’il épouse une bourgeoise, à l’époque ça m’avait fait bondir… Quant à celui-là, jamais entendu parler. Tu me donnes envie de relire Simone…

Répondre

Merci, ça m’a donnée envie de le lire (:
Bientôt dans ma bibliothèque!

Répondre

Pourquoi le mot "auteure" perce tant dans les blogs, magazines et journaux, alors qu’il n’est qu’un barbarisme? le mot auteur n’est pas vraiment masculin, c’est un masculin de neutralité (comme en latin).

Répondre

Il faut que je découvre les mémoires d’une jeune fille que Ninon m’a envoyées. Tu viens aussi de me donner envie de relire les voyages de Gulliver.:-)

Répondre

Ah mais non, ne te prive pas plus longtemps du bonheur de lire Duras!!!
File chez ton chouette libraire et lance-toi, tu ne le regretteras pas;)

Répondre

Ah ben oui… culte ! Moi aussi j’ai commencé par celui-là pour Beauvoir et… elle a fait très fort ! Si je peux me permette de compléter le "pitch" je parlerai de l’horreur de plus en plus diffuse vis-à-vis de l’amour. Car notre immortel tombe amoureux et voit ses amours mourir… Bref, à lire quoi… (j’aurai été jusqu’à "ne pas manquer" hihi)

Répondre

Je relis sans cesse les correspondances entre Castor alias Simon de Beauvoir et Sartre, de la pure magie je trouve. Pour ma part, "L’invité" reste mon préféré. Je crois avoir tout lu d’elle, je ne me lasse pas de ses mots, de son personnage.
Je retiens d’elle ces mots :

« Il est peu de vertus plus tristes que la résignation ; elle transforme en fantasmes, rêveries contingentes, des projets qui s’étaient d’abord constitués comme volonté et comme liberté. »

Répondre

J’ai commencé Beauvoir par les Mémoires d’une jeune fille rangée, et j’ai lu toutes ses Mémoires dans la foulée, puis les correspondances, Le Deuxième Sexe et qls romans. Tout ce qui touche à son vie est passionnant.

Répondre

Ce livre est vraiment beau, intéressant, marquant … je l’ai lu quand j’étais plus jeune et j’ai apprécié … mais j’adore également Marguerite Duras ^^ !

Répondre

Je refermai les yeux, j’étendis mes bras sur mes paupières, j’aurais voulu me rendormir m’enfuir ailleurs, il ne s’agissait pas d’entrer dans un nouveau monde si c’eût été ce monde il eut été le même.. J’aimais mes rêves parce qu’ils se passaient ailleurs. Je m’évadais le long d’un fil mysterieux de l’autre côté du ciel, de l’autre côté du temps et n’importe quoi pouvait arriver et je n’étais plus moi même. Je pressai mon bras plus fort contre ma face, des points d’or dansaient dans les ténébres vertes, mais je ne me rendormais pas j’entendais le bruit du vent dans le jardin, un bruit de pas dans le corridor, j’entendais avec mes oreilles et chaque bruit à sa place, j’étais éveillé et le monde était sagement couché sous le ciel et moi couché au milieu du monde avec ce goût de ma vie sur les lèvres pour toujours. Je pensai avec colère : Pourquoi m’a-t-il réveillé? pourquoi m’ont’ils réveillés ? C’était vingt ans plus tôt….

C’est mon passage préféré… Un excellent livre que j’ai lu à 13 ans, un livre qui ouvre l’esprit…
Qui m’a permis d’avancer et aussi d’écrire….

La derniere phrase du livre : Ce fût quand l’heure commenca de sonner au clocher qu’elle poussa le premier cri..
C’est la conclusion du livre pour moi, elle est poignante… 🙂

Répondre

Je viens juste de finir Tous les hommes sont mortels.. j’ai bien aimé comment à la fin tous le passé de Fosca ressurgit et les événements vécus s’entremêlent quand il se lie à la foule de la Révolution.. Pour ma part le meilleur roman métaphysique de Beauvoir reste l’invitée.. A lire surtout ses Mémoires qui sont passés à la postérité..

Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *